Attirance-rejet ou la dictature des normes sociétales
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Attirance et rejet, une dynamique paradoxale
Il y a des choses qu’on attire malgré soi. Un regard, une curiosité, une envie. Et puis, très vite, vient le rejet. Pas parce qu’on a changé, mais parce qu’on ne rentre pas dans la case prévue. Le phénomène du “ce qui me plaît, me gêne”. Quelque chose nous attire mais dérange à la fois. L’attirance-rejet, c’est ce mécanisme tordu qui consiste à s’approcher de ce qui brille autrement… puis à reculer dès qu’on s’aperçoit que ce n’est pas un miroir, mais une lumière qui pourrait éclairer autre chose que ses certitudes.
Je vis cette dynamique au quotidien dans mes relations humaines. Dans mes articles. Dans ma manière d’être au monde. En ce qui concerne l’écriture, ce que j’écris attire, pique la curiosité, fait mouche. Mais comme je ne flatte ni les normes ni les ego, je les déconstruis. Et comme ce n’est pas décoratif ou dans la ligne éditoriale du “vivre ensemble sous condition”, on me referme la porte au nez systématiquement. A contrario, on ne se gêne pas pour regarder par le trou de la serrure. On ne salue pas non plus, car ce serait se trahir. Ce serait trop risqué d’être vu en train d’aimer ce qui sort du cadre.
Ce phénomène ne me concerne pas uniquement moi. Il est révélateur d’un malaise collectif : une société qui veut séduire sans être bousculée. Il est le reflet d’un système où tout ce qui dépasse est d’abord scruté… puis corrigé. Et si ce n’est pas corrigible, ce sera isolé, caricaturé, ou réduit au silence. Bienvenue dans la liberté version conditionnelle. Descendez de votre confortable nuage et dites adieu au monde des Bisounours !
La reconnaissance selon les normes : Le cas emblématique de Van Gogh
Prenons le cas de Vincent Van Gogh, peintre néerlandais du XIXe siècle. Il est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands artistes de l’histoire de l’art. Pourtant, de son vivant, il n’a vendu qu’un seul tableau. Trop en avance sur son temps, trop à vif dans ses coups de pinceau, trop marginal dans son style et dans sa vie, il n’entrait pas dans les canons esthétiques de son époque.
Il n’est pas devenu un maître par la reconnaissance de son travail. Il est devenu un maître malgré et à travers le rejet, qui a nourri son mythe. Ce n’est qu’après sa mort que la société a osé regarder son œuvre autrement et à étudier sa vie.
Ce changement de point de vue prouve bien une chose : le talent, la beauté, l’intelligence, tout ce qui est abstrait comme l’art, n’a de valeur publique que s’ils collent aux attentes d’une société.
Le vrai talent dérange, lisse rarement les poils. C’est pourquoi les médias préfèrent nous servir de la soupe insipide : qui passe partout, qui ne bouscule rien, qui meuble l’ennui collectif sous forme de contenu “talentueux” pré-mâché.
La reconnaissance n’est certainement pas une question de mérite, d’autant plus à notre époque. C’est une affaire de timing, de conformisme et de digestion sociale.
Autrement dit, si tu ne corresponds pas, tu restes dans l’ombre. Jusqu’au jour où l’époque a suffisamment changé (ou s’est suffisamment repentie) pour te recycler en icône posthume.
Le système n’a pas changé depuis. Il préfère tuer maintenant, glorifier plus tard. Avec entre les deux, un silence confortable.
Beauté et poids : l'absurdité des critères occidentaux
À peine en CE2, et déjà sur la balance ! Officiellement, on vous dira qu’il s’agit de prévenir l’obésité infantile sous couvert sanitaire en imposant des critères d’IMC à de jeunes enfants. Officieusement, il s’agit de prévenir les phénomènes de rejet à venir parce qu’en France, disons-le crûment, les “gros” sont discriminés. On parle ici de santé publique, bien sûr. Toujours. Mais derrière le vernis du bon soin, il y a la crainte sociale du corps qui déborde. L’enfant est pesé, comparé, classé. Ceux qui sortent des courbes sont automatiquement suspects. Ils dérangent l’idéal lisse qui rassure. Encore une mission pour nos Super-Parlementaires !
Souvent, ces enfants dits “en surpoids” viennent de milieux où l’embonpoint est un signe de beauté, de santé, de prospérité. C’est une question de culture, encore une fois.
Même l’Occident a eu ses périodes de vaches grasses.
Prenons l’exemple de Marilyn Monroe, actrice, chanteuse et mannequin américaine des années 1950, fut l’une des plus grandes icônes de beauté et de sensualité du XXe siècle. Connue pour ses courbes généreuses et son aura magnétique, elle représentait à l’époque un idéal féminin très éloigné des standards actuels. Sa silhouette taille 42, aujourd’hui jugée « hors normes » par l’industrie de la mode, était alors synonyme de glamour, de désir et de féminité assumée. Aujourd’hui, elle serait recalée des podiums, voire envoyée en consultation diététique.
Même à la Renaissance, l’embonpoint était un marqueur de richesse. Les corps opulents étaient peints, glorifiés, parce qu’ils signifiaient l’abondance, là où le peuple, trop maigre pour plaire, trimait pour survivre.
Aujourd’hui, les rôles sont inversés, mais la logique reste. On juge encore les corps selon les moyens, les classes, les idéaux dominants.
Ce que cette norme occidentale masque également, c’est une logique économique. À qui profite le crime sous couvert de sanitaire ? “J’vous l’donne dans l’mille” : à l’industrie de la minceur, pardi. Régimes, substituts, pilules, applis… Un marché en or massif. Et si vous en doutez encore du haut de votre nuage cotonneux, regardez les pubs à l’heure des repas. D’après eux, il s’agirait d’amour. Ne s’agirait-il pas d’un matraquage constant, ciblé et chirurgical ?
Le corps n’est plus un lieu de vie, mais un produit à optimiser.
On ne veut pas que tu sois en bonne santé. On veut que tu te sentes mal, pour te pousser à acheter ce qu’on te dit de consommer. Ce n’est pas du soin, c’est du bourrage de crâne.
Et la balance, dans cette histoire, ne mesure pas la santé. Elle mesure l’adhésion aux normes.
Le voyeurisme comme conséquence du rejet
Il y a ceux qui assument leur attirance et il y a les autres. Ceux qui regardent de loin, qui s’approchent, puis qui reculent brutalement. Pas parce que tu les repousses, mais parce que tu les confrontes à quelque chose qu’ils n’avaient pas prévu : la complexité.
Ceux-là deviennent souvent les plus obsédés. Comme ils n’osent pas aimer ouvertement ce qui les trouble, ils préfèrent regarder en cachette. Épier, disséquer, imaginer devient leur leitmotiv décomplexé, comme s’il s’agissait d’une chose normale. C’est là que naît le voyeurisme. Cette fascination honteuse se transforme en frustration, puis vire vite en rancune.
Et cette rancune devient un poison qui cherche à salir ce qu’on ne peut pas contrôler.
J’ai vu ces comportements à l’œuvre : des hommes fascinés, puis fuyants, qui ne supportant pas de désirer sans dominer, finissent par espionner, extrapoler, salir. Ils traquent un détail, une faiblesse, une faille présumée, pour restaurer une supériorité symbolique qui leur a échappé. Ils ne supportent pas que quelque chose leur échappe, surtout si ce quelque chose les regarde droit dans les yeux et ne cille pas. Et ils croient encore que c’est toi le problème.
C’est ainsi que naissent les rumeurs, les fantasmes projetés, les récits déformés.
Harcèlement et voyeurisme sont les deux faces d’un même déni : celui d’avoir été attiré par quelque chose que l’on ne peut pas posséder.
La punition devient alors le seul moyen qu’ils trouvent pour tenter de reprendre la main. Mais tout ce qu’ils prouvent, en vérité, c’est qu’ils sont prisonniers de leur propre impuissance à aimer autrement qu’en contrôlant.
Le miroir de l’Elastic Heart
Il y a des symboles qu’on ne choisit pas, mais qu’on nous impose. Le clip Elastic Heart de Sia en fait partie. Pendant longtemps, certains s’en sont servis pour me parler en “langue des oiseaux”, comme pour m’envoyer un message codé. Une mise en scène symbolique, utilisée comme instrument de manipulation.
Dans ce clip, une jeune fille (Maddie Ziegler) et un homme adulte (Shia LaBeouf) s’affrontent dans une cage. Eux ont voulu y voir une allégorie de ma vie : l’homme, enfermé dans ses limites, figé, serait le compagnon. La jeune fille, libre de ses mouvements, rapide, mobile, ce serait moi. Sauf que cette image n’est pas flatteuse : elle est sournoise. Elle sous-entend que je suis libre… mais seulement en surface. Car à la fin du clip, la jeune fille revient et tente de ramener l’homme hors de la cage. Elle n’y parvient pas.
Le message qu’ils voulaient faire passer était clair : “Tu es celle qui pourrait s’échapper, mais tu es retenue par ton affect. Tu es prisonnière de ton propre cœur.”
Mais voilà, cette lecture qu’ils ont voulu m’imposer, je la retourne. Ce clip, je le reprends, et je le réécris à ma manière.
L’homme dans la cage, ce n’est pas mon homme. Ce n’est pas moi non plus. C’est le regard social. C’est l’œil de ceux qui jugent sans comprendre, qui projettent sans aimer. C’est leur système, leur norme, leur prison symbolique.
Et moi ? Je suis celle qui a compris que ce cœur élastique n’est pas une faiblesse. Il ne me tire pas en arrière. Il me rend résistante et résiliente. Il m’a appris à encaisser sans me rompre.
Elastic Heart, utilisé contre moi, devient le miroir que je brise. Ce n’est pas moi qui suis enfermée. C’est eux qui sont coincés dans une cage mentale qu’ils prennent pour la réalité.
Et ce miroir brisé, ce n’est pas un drame. C’est un soulagement. Parce qu’on ne guérit pas de ce qu’on subit en se regardant à travers les yeux de ceux qui veulent nous réduire.
La liberté, vraiment ?
On nous l’agite sous le nez comme un drapeau, la “liberté à la française”. On la chante, on l’enseigne, on l’inscrit sur les frontons. Mais à y regarder de plus près, cette liberté a des conditions non écrites, des clauses en petits caractères. Elle s’adresse à ceux qui rentrent dans les cases, qui ne débordent pas, qui disent merci quand on les oublie.
On est libre, paraît-il. Libre de penser… tant que ça ne pense pas trop fort. Libre d’exister… tant qu’on ne dérange pas les codes esthétiques, culturels ou moraux. Libre de parler… tant que ce qu’on dit peut être ignoré sans danger.
Mais quand on ne se conforme pas, ni dans le fond, ni dans la forme, alors la liberté devient solitude. Puis exclusion. Puis disqualification sociale, économique... Il ne s’agit plus d’être libre, mais d’être formaté à une certaine vision de la liberté. Et ceux qui ne rentrent pas dans le moule doivent apprendre à vivre dans les marges, en silence, ou à leur risque.
La liberté en France existe donc… mais pour ceux qui savent la jouer selon les règles implicites du jeu. Pour les autres, elle devient une épreuve. Et parfois, une provocation.
Mais au fond, cette mise à l’écart soulève une autre question : qui, de nous ou d’eux, est réellement hors norme ?
Qui est hors norme ?
Pendant longtemps, j’ai cru que c’était moi. Trop directe, trop différente, trop entière. J’ai intégré ce que le regard des autres répétait en silence : “tu n’es pas comme il faut.” Et puis j’ai compris que le problème n’était pas dans mon reflet. Il était dans le miroir.
Parce que ce miroir-là, celui que la société tend à ceux qui ne rentrent pas dans ses moules, il est déformant. Il ne reflète pas, il reprogramme. Il ne montre pas ce que tu es, il projette ce que tu devrais être pour ne pas faire tache.
Alors non. Je ne suis pas hors norme. Ce sont leurs normes qui sont hors de sens.
Le miroir est brisé. Volontairement. Définitivement. Et dans ces éclats, je vois enfin ce que je suis : sans filtre, sans ajustement, sans permission. C’est là que commence la vraie liberté. Pas dans l’adaptation à ce qui oppresse, mais dans la fidélité à ce qui éclaire.
Pour ceux qui seraient tentés de me reprocher un manque d’adaptation, je répondrai ceci : on ne s’adapte pas à une camisole, on la déchire. S’adapter à un système malade, c’est devenir son symptôme.
Je préfère encore être l’élément perturbateur que le rouage bien huilé de leur mécanique absurde.
Et si l’on doute encore de ma capacité à m’adapter, qu’on me suive une fois dans un bassin de 50 mètres, qu’on regarde comment je respire, comment je glisse, comment je tiens sur la distance.
J’ai appris à m’adapter, oui. Mais à ce qui m’élève. Pas à ce qui m’éteint.
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